Trois illustrations tricolores sur un fond de papier journal montrent des anneaux entremêlés, la silhouette de la Tour Eiffel et le parcours de la Seine

Vers Paris 2050

Des socles de fictions à enrichir pour imaginer les futurs résilients de Paris à l’horizon 2050

Ville de Paris + CAUE 75

2022

La démarche « Vers Paris 2050, affronter ensemble les défis de notre siècle », portée par la Ville de Paris et le Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement (CAUE) de Paris, a invité une pluralité de contributrices et contributeurs à imaginer et représenter la vie quotidienne à Paris en 2050.

Étudiant(e)s, citoyen(ne)s, architectes, artistes, élèves du primaire et du secondaire parisiens ont exprimé et matérialisé leurs visions pour le futur de la Capitale, sur la base de quatre textes d’inspiration imaginés par notre studio. Ces fictions ont permis de « planter le décor » de différents futurs possibles à Paris en 2050, en fonction de l’impact des crises susceptibles de survenir dans les prochaines décennies et des diverses politiques publiques mises en œuvre pour y faire face.

  • Répétitions générales raconte comment Paris devient le théâtre de répétitions ludiques pour jouer et déjouer les crises, épaulant les individus et les collectifs dans leurs stratégies de réponse et d’adaptation.
  • Le droit à la fraîcheur aborde comment la ville fait face collectivement pour préserver le vivant humain comme non-humain lors des vagues de chaleur annuelles.
  • Paris partagé imagine comment une vague migratoire provoquée par le réchauffement climatique instaure une nouvelle logique du partage de la ville et de ses ressources.
  • Fluctuat nec mergitur décrit comment une crue centennale de la Seine stimule la transformation des modes de vie des Parisien(ne)s et renouvelle leur rapport à l’eau.

Chaque fiction s’est voulue un socle sur lequel les parties prenantes de la démarche ont pu construire leurs propres histoires et imaginaires. Pour les plus curieuses et curieux, chaque récit initial était mis en perspective par une sélection de tendances à l’œuvre et de signaux faibles, levant ainsi le voile sur ce qui a inspiré cet horizon.

Ces travaux ont fait l’objet d’une exposition au Pavillon de l’Arsenal, ouverte au grand public, et ont donné lieu à des rencontres avec des experts entre février et mars 2024.

Lors d'une visite guidée, les visiteurs regardent une maquette de bâtiment lors de l'exposition Vers Paris 2050

↑  L’exposition au Pavillon de l’Arsenal présentait au grand public les visions imaginées par les participant(e)s à Vers Paris 2050.

[Crédits : Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement de Paris]

Le territoire parisien devient un gigantesque théâtre de « répétitions aux crises » pour aider chacun·e à trouver et à répéter les actions à jouer lors des crises. Sur une base régulière, on simule des catastrophes de grande ampleur à l’échelle de la ville : crue de Seine, sécheresse, canicule, incendie, inondation, tempête, cyberattaque… tout en accompagnant les individus et les collectifs dans leurs stratégies de réponse et d’adaptation.

Ces répétitions ludiques visent à renforcer l’acclimatation aux crises pour désamorcer leur caractère anxiogène et permettent que chacun·e s’améliore au fil du temps. Exploiter les ressorts de l’événementiel sert aussi à embarquer les habitants afin que tout le monde puisse se prêter à l’anticipation.

Paris se peuple d’éléments de décor qui brouillent la frontière entre réalité et fiction pour garantir la dimension immersive de ces répétitions. Les outils numériques sont également mobilisés pour renforcer la coopération entre acteurs et l’illusion de la crise : communiqués fictionnels sur les réseaux sociaux, alertes diffusées sur les supports numériques de l’espace urbain, ambiances sonores dans la ville, applications de suivi des événements.

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La signalétique ludique de crise

Cette nouvelle signalétique (panneaux, marquages, cartographies) s’enracine dans les rues de Paris et les usages numériques pour signaler les mutations du territoire au fil des simulations de crises : réseaux d’entraide, zones de ressources, mobilier de protection, zones de repli… en mobilisant les codes et ressorts du jeu.

Par exemple, la colonne de Juillet de la place de la Bastille a été transformée en jauge de progression, le temps d’une crise scénarisée, pour signaler visuellement le niveau de résilience des infrastructures parisiennes.

Le Droit à la fraîcheur s’est imposé comme droit inconditionnel du bien-être du vivant. Pendant le jour, il s’agit d’éviter les décès des plus fragiles. Pendant la nuit, il va de pair avec le droit à un sommeil réparateur, mis en péril par la chaleur nocturne. L’objectif : s’assurer individuellement et collectivement de garder la tête suffisamment froide pour prendre les décisions adaptées afin d’affronter la vague de chaleur.

S’ensuivent des transformations des infrastructures et des modes de vie pour permettre à chacun·e de jouir de ce droit.

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La politique de végétalisation s’oriente sur la lutte contre les îlots de chaleur urbains, la constitution de refuges et de points d’eau pour les humains comme les animaux. En effet, le Droit à la fraîcheur concernant l’ensemble du vivant parisien, on n’oublie pas les espèces autres qu’humaines qui peuvent utiliser les espaces verts et bleus offerts par la ville.

Les mois précédents l’arrivée du Dôme, Paris se prépare en économisant et en stockant l’eau dans des réservoirs souterrains placés sous haute surveillance et d’autres lieux gardés secrets. Il s’agit de garantir un accès équitable à cet or bleu pendant l’épisode caniculaire, en imposant aussi des limites d’utilisation sur les eaux disponibles dans la ville (eau potable, eau non potable, eaux pluviales et eaux usées) en fonction des usages.

Les supports de l'exposition Vers Paris 2050 avec les affiches et les propositions imaginées par les participants aux ateliers

[Crédits : Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement de Paris]

En 2050, la France, et particulièrement la région parisienne, fait face à un afflux migratoire de grande ampleur : réfugiés, migrations économiques, migrations régionales provoquées par le réchauffement climatique.

Celui-ci n’épargne pas la moitié sud du pays et nombreux sont celles et ceux qui font le choix de « monter au Nord », transitant ou s’installant à Paris. Pour accueillir ces nouveaux arrivants sur le territoire déjà soumis à une forte pression urbaine et à une pénurie de ressources, la Ville de Paris instaure une nouvelle politique du partage.

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Pour celles et ceux « qui n’ont rien à mettre en partage », à commencer par les personnes sans lieu de vie fixe et les personnes de passage comme les touristes, la Ville de Paris propose d’adopter une monnaie locale et solidaire permettant de convertir tout effort pour la cause environnementale en valeur monétaire.

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La cryptomonnaie Kapitale

Cette cryptomonnaie proposée par un acteur privé vient concurrencer la monnaie d’échange locale et solidaire de la Ville de Paris. Sur le même principe de rémunération des comportements éco-responsables en valeur monétaire, la Kapitale cible les habitant·es les plus aguerri·es aux outils numériques, répliquant une forme de privilège pour celles et ceux qui sont déjà en capacité de s’engager dans des modes de vie plus respectueux de l’environnement. Le maillage de Paris par une diversité de capteurs et leur suivi en temps réel par des intelligences artificielles pose aussi des questions quant à la surveillance permanente et au coût carbone de la Kapitale.

Annoncée et redoutée depuis longtemps, la grande crue centennale de la Seine aura fini par se produire le 13 janvier 2030. La Ville de Paris et ses partenaires avaient anticipé la possibilité d’une crue et investi dans des mesures de prévention et de protection en conséquence, mais celles-ci n’auront pas suffi à endiguer la montée des eaux dans un contexte de pluies et d’orages incessants.

De par son ampleur, comparable à celle de 1910, la crue a entraîné la saturation du lac-réservoir de la Seine situé en amont du fleuve et le débordement du réseau des eaux usées, causant des inondations qui ont mis à mal la majeure partie de la capitale.

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Le caisson de l’essentiel

Un caisson étanche est fourni à chaque foyer par la Ville de Paris dans le cadre d’une démarche « d’accompagnement à la perte matérielle ». Il s’agit de prendre un temps pour réfléchir en famille aux objets qu’on voudrait sauver d’une potentielle inondation et ainsi faire la part de l’essentiel et du superflu. Les biens jugés non-essentiels sont recyclés ou réemployés pour de nouveaux usages lors de la « Fête de la mue », qui se tient une fois par an en haut de la Butte Montmartre et au cours de laquelle on célèbre des modes de vie recentrés sur l’essentiel.

Un photomontage monochrome affiché lors de l'exposition présente une manifestation d'activistes pour le climat sur le site de l'Univercité des pratiques populaires

[Crédits : Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement de Paris]