
Se former à l’épreuve des futurs
Un plan de formation pour une action publique locale à l’épreuve des futurs
La Région Centre-Val de Loire s’est prêtée à l’exercice de l’exploration des futurs pour repenser son plan de formation 2023-2026. Notre studio s’est associé au Centre National pour la Fonction Publique Territoriale (CNFPT) pour une démarche de Design Fiction dont l’ambition était de compléter le traditionnel diagnostic des besoins en compétences dressé par la direction des ressources humaines de la collectivité.
Avec ce parti-pris de l’anticipation, l’objectif était non seulement d’inspirer, mais aussi de crash-tester le nouveau plan de formation selon deux partis-pris :
- Identifier les angles morts prospectifs du plan de formation, en se projetant au-delà des besoins en compétences déjà recensés à court terme, afin de détecter les capacités dont la Région pourrait avoir besoin pour faire face aux enjeux et défis de la décennie à venir.
- Renouveler les imaginaires de l’action publique territoriale, en se permettant d’envisager de nouveaux savoir-faire et savoir-être inattendus au sein de la collectivité, tout en réinterrogeant l’éthique de ses modes d’action actuels.
Suite à une phase de documentation prospective, trois thèmes transformateurs ont été retenus pour l’exploration : la redirection écologique, l’automatisation de l’action publique, la résilience face à un état de crise permanent.
Un triptyque de scénarios de Design Fiction a donné corps aux enjeux propres à ces thèmes :
- L’éco-score des organisations publiques, où une notation permanente de l’impact écologique de l’action publique amène à se demander ce qu’il faut à la fois faire et défaire.
- En chair et en OS*, où des agents-intermédiaires se font les porte-voix humains des analyses et des choix de l’intelligence artificielle, auprès des usagers.
- L’Académie de la Résilience, avec un tiers-lieu apprenant où l’on développe les (inter)connaissances pour répondre aux crises de demain, et où l’on entretient le territoire d’aujourd’hui grâce aux régies locales de maintenance publique.
*Operating System : système d’exploitation

La Région Centre-Val de Loire reconfigure l’ensemble de ses politiques publiques et de son action sous l’angle de l’éco-score. Le cap sera désormais l’impératif écologique, conduisant à se poser la question des services essentiels à rendre au citoyen. En effet, le meilleur moyen d’améliorer sa note est autant de bien faire que de défaire, toujours en toute transparence.
L’innovation se raisonne pour se concentrer sur le « juste nécessaire ». Sans amertume, on renonce à certaines compétences non-obligatoires et on abandonne des pratiques et dispositifs devenus superflus. On fait le deuil d’activités et de moyens qui ne sont plus compatibles avec les limites écologiques du territoire ou de la planète. L’éco-score apporte ce soupçon de rationnel et de mesurable qui manquait pour tourner la page de certains services publics devenus nuisibles à l’intérêt général.
Extrait du scénario
L’Éco-score des organisations publiques


↑ L’éco-score des organisations publiques
Le tableau de bord pour le suivi de l’éco-score de la Région Centre-Val de Loire en 2030.


↑ L’éco-score des organisations publiques
Un appel à la contestation contre « l’éco-flicage » de la part d’un syndicat d’agents opposés au dispositif.

Alors que d’autres administrations et collectivités ont depuis longtemps cédé aux sirènes des chatbots — ces robots conversationnels qui ont envahi nos interfaces — la Région Centre-Val de Loire a décidé de maintenir l’humain pour ses relations directes avec les habitants. C’est notamment le cas pour l’accueil du public. Mais comment marier le meilleur des deux mondes, l’empathie de la personne et la puissance de calcul de la machine ?
Pour résoudre l’équation, la Région a mis en place les « agents-intermédiaires » (les Agintes). Un agent-intermédiaire a pour mission de transmettre « de vive voix » les résultats de l’analyse ou de la décision d’une intelligence artificielle.
Autant les applications sont multiples : renseigner un usager sur ses droits, l’informer sur l’obtention d’une formation ou d’une subvention, lui offrir un service personnalisé.
Autant le système se veut simple : l’intelligence artificielle opère ses analyses et livre le résultat à l’agent-intermédiaire sous forme d’un script qui est à restituer verbalement à l’usager.
Extrait du scénario
En Chair et en OS


↑ En chair et en OS
L’interface d’intermédiation augmentée, mise à disposition des agents-intermédiaires au contact des publics dans un lycée.

↑ L’Académie de la Résilience
Le plan d’un campus de l’Académie de la Résilience à Châteauroux, qui en présente les espaces et les missions.

↑ L’Académie de la Résilience
L’invitation faite aux habitants de rejoindre un atelier convivial de réparation, organisé par une Régie Locale de Maintenance Publique.
Le temps d’une journée, un atelier de projection est venu mettre en jeu ces trois scénarios spéculatifs. La session a réuni un panel diversifié d’agents de la collectivité, issus de différents services et niveaux de responsabilité. En groupes, les participants ont ainsi tiré profit des design fictions pour imaginer le profil de différents agents du futur, en définissant les nouvelles missions, compétences et outils qui leur permettraient de faire face à chacune de ces trois transformations et d’y répondre au quotidien.
La démarche s’est conclue par une mise en perspective des enjeux, postures et compétences identifiés en atelier, offrant ainsi un socle d’enseignements et d’idées pour enrichir et ajuster le plan de formation à venir.